5ème dimanche Carême C

Cet évangile est déjà un prélude à la Semaine Sainte qui approche car nous voyons Jésus aux prises avec ses adversaires qui lui tendent un piège pour pouvoir l’accuser. Vous comprenez bien que la cible de ces pharisiens n’est pas cette pauvre pécheresse – elle n’est qu’un prétexte – c’est Jésus que l’on veut abattre. D’ailleurs on peut se demander jusqu’à quel point tout n’a pas été manigancé par ces hommes perfides pour arriver à leurs fins : faire arrêter Jésus. Il n’est pas du tout exclu qu’ils aient tendu un piège aussi à cette femme dont ils connaissaient la faiblesse… Quand on est rempli de haine, on est prêt à toutes les perversions pour faire disparaître celui qui dérange. 

On présente donc à Jésus une femme prise en flagrant délit d’adultère: transgression au 6ème commandement du décalogue considéré comme suffisamment grave pour être punie de mort par lapidation selon la réglementation juive mentionnée au Livre du Lévitique ; livre qui rassemble toutes les prescriptions juridiques qui règlementent la vie sociale du peuple juif. Il faut faire une distinction entre la loi morale immuable des dix commandements inscrits sur des tables de pierre, et les prescriptions juridiques de la loi qui sont des garde-fou adaptés aux moeurs d’une époque.

Jésus ouvre un chemin nouveau, comme l’annonce le prophète Isaïe : « ne songez plus aux choses d’autrefois. Voici que je fais une chose nouvelle : elle germe déjà (…) je vais faire passer un chemin dans le désert, des fleuves dans les lieux arides ». Jésus est ce chemin nouveau qui nous fait passer de la lettre rigide de la loi à l’esprit de la loi qui est amour, qui est au service de la vie de l’homme, de son relèvement, pas de son anéantissement. C’est un germe qui grandira avec le temps, et il faudra un murissement progressif pour que l’Eglise décide de dire non à la peine de mort, et la société avec elle. Jésus nous a ouvert le chemin de la miséricorde qui est la main tendue au pécheur pour qu’il se repente.

Il ne relativise pas pour autant le 6ème commandement : « Tu ne commettras pas d’adultère », au contraire, il le rend encore plus exigent en l’étendant à l’adultère du coeur : « Vous avez appris qu’il a été dit : Tu ne commettras pas d’adultère. Eh bien moi, je vous dis : Tout homme qui regarde une femme et la désire a déjà commis l’adultère avec elle dans son coeur ». On ne peut pas reprocher à Jésus d’être laxiste ; il dénonce très clairement le péché, et d’ailleurs il dira à cette femme : « va et ne pèche plus ». Mais avant toute chose, Jésus veut démasquer ce qui est plus grave que l’infidélité, à savoir : se fermer à ce chemin nouveau qui est le Christ, en ne voulant pas voir l’évidence qu’il y a la Main de Dieu dans les oeuvres de Jésus, et préférer le mensonge, la haine, la cruauté, le fanatisme, à la voie de la miséricorde.

Jésus nous offre comme unique planche de salut, la miséricorde:  « Celui d’entre vous qui est sans péché, qu’il soit le premier à lui jeter une pierre. » « tous s’en allèrent un par un, en commençant par les plus âgés », pour laisser Jésus seul avec la pécheresse. La miséricorde et la misère humaine se sont rencontrées dit st Augustin. « Personne ne t’a condamné? Moi non plus je ne te condamne pas. Va et désormais ne pèche plus. » Quelle douceur et quelle tendresse dans ces paroles de Jésus! comme dans son attitude : il s’abaisse… comme il s’est abaissé pour laver les pieds de ses disciples, et il écrit sur le sol, peut-être la loi nouvelle comme jadis le doigt de Dieu a écrit le décalogue.

Quand l’homme accepte de se laisser regarder par le Miséricordieux, sans oublier le prix que lui a coûté cette miséricorde, il retrouve sa dignité d’enfant de Dieu. St Paul qui a persécuté le Christ, saisit mieux que quiconque le mystère de la miséricorde divine. C’est pourquoi il ne sait plus voir que cela, et considère tout le reste comme sans valeurs. C’est la miséricorde de Dieu moyennant la foi au Christ qui nous sauve et non nos réussites, et ce qui nous fait briller, que nous nous approprions si facilement.

Sachons tirer profit de cette grande Semaine sainte qui approche, en accompagnant Jésus sur le chemin de sa Passion et de sa mort, pour mieux saisir ce que lui a coûté sa miséricorde. Accueillons le pardon qu’il nous offre spécialement dans le sacrement de réconciliation, et puisqu’Il nous a pardonné, débordons à notre tour de miséricorde, ainsi nous lui ressemblerons un peu et nous donnerons beaucoup de joie au ciel.

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