5ème dimanche Carême B

« Si quelqu’un veut me servir qu’il me suive, et là où je suis, là aussi sera mon serviteur ». Où est Jésus ? Là où l’Amour est en action. L’Amour qui a ses mystères joyeux, douloureux et glorieux. « L’amour fort comme la mort » dit le Cantique des Cantiques ; l’amour qui consent à passer par le creuset de la souffrance physique, morale, spirituelle, jusqu’à l’épreuve ultime de la séparation du corps et de l’âme. « Si quelqu’un veut me servir, qu’il me suive ». Si quelqu’un veut me servir, qu’il me ressemble en étant l’amour en action dans tous ces passages inévitables de la vie qui nous font passer de la joie à la douleur, et de la douleur à la gloire éternelle.

« Je te suivrai partout jusqu’à la mort» a dit Pierre à Jésus, et Jésus lui répond: « non Pierre, avant que le coq n’ait chanté deux fois, tu m’auras renié trois fois… » C’est pourtant l’amour qui l’a fait parlé ainsi. Mais un amour à la mesure de son humanité blessée marquée par la faiblesse devant la tentation, la souffrance et la mort. Il n’y peut rien Pierre, et nous non plus. Depuis le péché d’Adam l’homme est marqué par la peur. Seul Dieu peut le transformer, seul Dieu peut le rendre fort par sa grâce surnaturelle, s’il consent à abandonner à Jésus sa bonne Volonté, et à le laisser faire, comme la semence qui tombe en terre et doit mourir. Dans la terre de son Coeur de miséricorde, Dieu agit secrètement, imperceptiblement.

Jésus parle dans l’évangile d’une certaine école qui nous fait entrer dans « la connaissance du Seigneur ». Déjà le prophète Jérémie disait : « Apprends à connaître le Seigneur car tous le connaîtront et n’auront plus besoin de s’instruire mutuellement ». « Tous le connaîtront » référence à l’avènement du Christ et plus précisément à son 2nd avènement. En attendant qu’il vienne dans sa gloire, nous devons nous mettre à son école qui est l’école de l’amour et du détachement par rapport à la vie de ce monde blessé séduit par le mal, le péché et la mort: « Celui qui aime sa vie la perd ; celui qui s’en détache en ce monde la garde pour la vie éternelle ». C’est ce que Pierre a fini par vivre, après son triple reniement. Il ne lui a pas été inutile, il lui a fait comprendre qu’à cette école, l’acteur principal n’est pas l’homme – trop faible – mais le Saint-Esprit, la grâce de Dieu dans l’homme. Jésus vivant dans le cœur de l’homme, comme l’annonce le prophète Jérémie. C’est Lui qui lui donnera la force du martyre de sang, comme à St Jean il donnera la force du martyre d’amour. Il ne faut pas penser que notre religion nous fait refuser les joies de l’existence. Laissons cela à Nietsche. La réalité c’est que Dieu veut nous faire passer de l’amour de ce monde à l’amour de Dieu et de sa Vie à Lui qui est plénitude d’amour pour toujours. Quand on a l’impression qu’il nous ampute parfois du meilleur de nous-mêmes, il nous détache en fait de ce qui est terrestre et nous tourne vers ce qui est céleste. Il ne veut pas que nous nous arrêtions à ce monde matérialiste, il veut que nous aimions Dieu et nos frères, pour qu’une plénitude de Vie nous soit offerte et que nous en vivions les prémices dès cette terre.

Jouir des joies de l’existence n’est pas interdit, si nous les vivons dans le détachement et le partage, non dans l’égoïsme qui nous rend insensible aux appels des autres. Mais l’apprentissage de cet amour véritable, c’est Dieu qui se charge de nous le transmettre dans le Christ, à la mesure de notre obéissance qui s’apprend au creuset de la souffrance comme nous le rappelle le reniement de Pierre et l’épitre aux hébreux. « Il apprit par ses souffrances l’obéissance ». C’est vrai que les épreuves nous détachent de cette vie, et nous aident à tourner nos cœurs vers Celui qui ne sait qu’aimer, consoler et restaurer. C’est une école à la fois de prière et de sacrifice, où ne nous sont pas épargnées les chutes mais Jésus est là qui nous relève et nous redonne sans cesse des forces neuves.

Sur l’autel, dans quelques instants, va s’opérer l’admirable échange, Jésus va offrir sa Vie en sacrifice à tous, et nous lui donnerons notre vie pleine d’imperfections… et recevant sa Vie, son Amour, selon une mesure bien pleine avec un cœur bien ouvert, bien disposé, nous donnerons à notre tour notre vie à nos frères. Et en leur donnant notre vie, nous leur donnerons Jésus.

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