5ème dimanche Ord A

« Vous êtes le sel de la terre…vous êtes la lumière du monde » Comment comprendre ces paroles que Jésus nous adresse ? Avons-nous plus de saveur que les autres ? Brillons-nous plus que les autres ? Gandhi qui était touché en lisant les évangiles, n’a pas pu franchir le pas d’embrasser la foi à cause des chrétiens. Il disait : « J’aime le Christ, mais hélas les chrétiens ne vivent pas conformément au Christ ». Il a jugé l’arbre à ses fruits, et les fruits n’étaient pas assez savoureux pour qu’il s’y arrête. Beaucoup résonnent ainsi, mais ils oublient la parole de Jésus: « Ne jugez pas et vous ne serez pas jugés » (Mt 7, 1) Qui peut dire qu’il est saint ? Personne ! Qui peut dire qu’il est pécheur ? Tout le monde ! Jésus le sait. Il connaît notre faiblesse, c’est bien pour cela qu’il dit : « vous êtes la lumière du monde », et non « vous êtes les lumières du monde ». Il y a une nuance subtile : Celui qui est saint c’est Jésus-Christ, et avec Lui nous formons un Corps qui est Lumière.

C’est dans la mesure où nous sommes un Corps uni, unifié dans le Christ, que nous devenons ensemble la lumière du monde. C’est dans la mesure où l’Eglise est une famille unie par les liens de la charité et de la paix – parce qu’unie au Christ, seul vraie lumière – qu’elle devient lumière du monde. Aucun chrétien, isolément, ne peut prétendre être cette lumière, ou détenir la vérité, ou se déclarer saint sous prétexte qu’il ne fait rien de comparable à ces choses mauvaises dont les médias nous abreuvent. Quand le pape Jean-Paul II s’adressait aux jeunes que nous étions, en nous disant : « n’ayez pas peur d’être des saints, il sous-entendait « n’ayez pas peur d’être uni au Christ et à son Corps qui est une famille où doit circuler l’Esprit d’amour. » Il n’y a pas de sainteté possible en dehors de cette union au Christ et à son Eglise dans le Saint-Esprit, parce que la sainteté est essentiellement une communion les uns avec les autres. Il ne s’agit pas seulement de ne pas faire de mauvaises choses. Il s’agit d’être bon avec tous, en commençant par ceux qui ne peuvent pas nous le rendre : les pauvres, les malades, les prisonniers, mais aussi ceux qui nous déçoivent, nous heurtent, nous blessent… mais ceux-là, comment les aimer ? En priant pour eux, se rappelant qu’il y a un mystère d’iniquité. Le discernement du bien et du mal est une chose, mais juger et condamner les personnes en est une autre.

« Vous êtes le sel de la terre…vous êtes la lumière du monde » Le sel est pour tous les aliments sans distinction ; de même la lumière doit être au service de tous, des bons comme des méchants. La sainteté est essentiellement bonté envers tous. Celui qui fait un tri entre les bons et les méchants, pour n’aimer que ceux qui lui sont agréables, quitte cette lumière de sainteté, même s’il fait des bonnes choses et qu’il ne se complait pas forcément dans le mal. « je n’ai rien voulu savoir parmi vous, sinon Jésus-Christ et Jésus-Christ crucifié » dit st Paul aux corinthiens. Cela veut dire que cette lumière qui est communion avec les autres, génère forcément de la souffrance ici-bas ; il faut souffrir avec le Christ, ne serait-ce qu’en supportant les défauts des autres, leurs péchés, leurs erreurs, sans juger, sans médire, sans condamner. Sur ce registre du péché par la pensée ou par la parole, qui peut se targuer d’être une lumière de sainteté ou d’être la saveur du monde ? Notre sainteté existe pourtant, mais en tant que participation de la sainteté du Christ ; elle existe pour ceux qui font le choix de l’amour en actes, et qui, inlassablement, se repentent de ne pas aimer assez Dieu et le prochain, puisant continuellement à la source du cœur miséricordieux de Jésus, pour avoir la force de se corriger et ne pas laisser l’amour s’affadir, cet amour qui se nourrit de prière et de sacrifice. C’est un chemin exigent, mais la récompense en vaut la peine.

Poster un commentaire