Ne riposte pas au méchant ; mais si l’on te frappe sur la joue droite, présente aussi l’autre ; A celui qui veut prendre ta tunique, laisse-lui aussi ton manteau… Des paroles bien difficiles à mettre en pratique ! Pourtant le Seigneur insiste : Aimez vos ennemis, priez pour ceux qui vous persécutent, afin d’être vraiment les fils de votre Père qui est aux cieux. En clair, cela veut dire que c’est une nécessité si nous nous disons chrétiens. Ce n’est pas réservé à une élite de chrétiens. Celui qui dit « moi je veux bien faire ce que le Seigneur demande, mais aimer mes ennemis, il n’en est pas pas question», celui-là n’est pas digne du Royaume nous dit Jésus, parce qu’il n’est pas vraiment fils de son père qui est aux cieux. Même s’il pratique le dimanche.
En méditant l’évangile, je me suis souvenu d’un épisode que j’ai vécu à l’âge de 15 ans, j’étais en seconde, et au cours d’un temps de discussion orale entre le professeur de français et les élèves, le prof avait tendance à lancer des piques à l’encontre de la religion chrétienne. Un jour j’ai trouvé bon d’afficher mon identité de chrétien pratiquant sans en mesurer les conséquences. Un élève, pour amuser la galerie, a commencé à m’appeler « le curé ». Cela ne me plaisait pas évidemment et je le lui faisais comprendre comme je le pouvais. Loin de le dissuader ça l’encourageait de plus belle. Un jour, l’idée lui prend, avec un accolyte, aussi costaud que lui, de me prendre de force et de me déposer sur une flaque d’eau… Comment pouvais-je l’aimer ? ou prier pour lui ? Je n’avais qu’un profond mépris pour lui et de la rancune. Je n’avais pas les moyens de me venger : il faisait une tête de plus que moi, et en plus il était plus brillant ; il avait une intelligence scientifique que je n’avais pas. Et voilà que Dieu dit : « tu ne te vengeras pas, tu ne garderas pas de rancune contre les fils de ton peuple » Et Jésus qui dit : « Aimez vos ennemis !» Mais comment ?… A l’époque je n’avais pas la réponse, d’ailleurs je ne me la posais même pas.
Aujourd’hui j’ai la réponse. Adolescent, je ne pouvais pas aimer ce garçon qui me persécutait, parce que je n’aimais pas le Seigneur. Je ne le priais pas ; je ne lisais pas amoureusement la Parole de Dieu. J’étais chrétien, oui, culturellement parlant, socialement parlant, mais mon cœur était loin du Seigneur. J’allais à la messe le dimanche parce que j’étais attaché à mes parents et que je leur étais naturellement obéissant. Mais ça n’a pas duré à ce régime… l’année suivante, j’ai cessé de pratiquer. Heureusement le Seigneur a frappé à ma porte l’année de mes 18 ans et mon cœur s’est ouvert à lui, vraiment ; j’ai compris qu’il était vivant et agissant, et qu’il attendait de moi une relation d’amitié intime nourrie de prière et de sacrifice, comme toute amitié. J’ai compris que c’était la condition pour grandir dans l’amour de Dieu, et pour qu’il me transforme, pour qu’il me divinise. Nous avons un cœur naturellement capable de belles choses, mais si pauvre, si limité, que nous ne savons qu’aimer ceux qui nous aiment. Mais si le Seigneur devient l’hôte vivant de notre âme, et que nous le prions, que nous prions pour nos persécuteurs, alors nous apprenons à aimer nos ennemis, non pas en « tendant l’autre joue » (c’est une manière de parler), mais en ne laissant pas la haine nous contaminer. Jésus qui a été giflé, n’a pas tendu l’autre joue, il a dit: « Si j’ai mal parlé, dis-moi ce que j’ai dit de mal, mais si j’ai bien parlé, pourquoi me frappes-tu ? » Il lui répond, sans haine, en interpellant sa conscience, comme le premier martyr Etienne qui prie en disant : « ne leur impute pas ce péché » alors qu’il est lapidé.
Nous sommes faibles et limités, c’est un fait, mais cela ne doit pas nous faire démissionner : « je ne serai jamais saint, je ne suis qu’un pauvre pécheur… » C’est faux ! Du moins pour ce qui est de la première proposition. st Paul aux Corinthiens nous dit que « nous sommes le sanctuaire de Dieu car l’Esprit de Dieu habite en nous … ce qui fait de nous des princes, des fils et filles de Dieu ». « le monde, la vie, la mort, le présent, l’avenir, tout est à nous, mais nous, nous sommes au Christ et le Christ est à Dieu. Parce que Dieu est saint, nous serons saints, mais pas sans un combat de tous les jours où nous expérimentons notre pauvreté, mais aussi la fidélité de Dieu. Il donne son amour et sa miséricorde à ceux qui le lui demandent dans la foi. Le combat ne prendra fin qu’en entrant dans le Royaume. Alors, comptons sur la fidélité du Seigneur, et ne nous résignons jamais au mal.
Commentaires (2)
Patricia vanlerberghe says:
22 février 2017 at 14 h 42 minMerci Père Emmanuel-Marie de nous accompagner, de nous épauler et de nous encourager encore ce jour (comme dimanche dernier) à vivre ces petits riens de notre quotidien qui font la trame de notre vie de foi et auxquels il est bien difficile de se plier par manque d’assiduité, de persévérance, de courage…
Soyez bénis pour vos mots si simples mais si intenses et de grand soutien qui nous redonnent entrain pour poursuivre.
Grâce vous soit donnée de demeurer fort dans la foi et de nous affermir, de ce fait, encore et toujours.
Je prie pour le pape et vous tous prêtres et serviteurs du Christ, pour votre mission si belle mais si difficile de nous conduire , pauvres brebis fragiles.
Unie à vous par Marie et Jésus
Patricia V
Père Emmanuel Marie says:
23 février 2017 at 9 h 00 minBonjour Patricia, Merci pour votre message toujours plein de bienveillance et d’encouragement. Puisse l’Esprit Saint nous conduire sur ce chemin de la conversion au quotidien dans la simplicité et l’ouverture du coeur. Merci de prier pour moi et ma communauté. Je prie pour vous, pour que toute difficulté soit traversée et toute souffrance transformée en joie, par sa grâce.
Bien à vous en Jésus et Marie
P.Emmanuel-Marie