Jubilé – Porte Sainte : quel message ? Conférence du 13 décembre

I/ Qu’est-ce qu’un jubilé ?

Le 8 décembre, en la fête de l’Immaculée-Conception s’est ouverte à Rome un jubilé extraordinaire de la miséricorde qui s’achèvera en la fête du Christ-Roi, le 20 novembre 2016. C’est ainsi que le pape François a voulu l’intituler. Dans la tradition catholique, le jubilé est par définition, le temps de la miséricorde, et plus précisément le temps du Christ qui offre sa miséricorde, sa grâce à l’humanité. Vouloir l’intituler le jubilé extraordinaire de la miséricorde, ce n’est pas de la redondance de la part du pape, c’est une insistance prophétique liée aux temps que nous vivons, qui sont des temps de grande détresse, de grandes tribulations et de grands péchés. Mais le pape sait bien que, comme le dit St Paul aux Romains, « où le péché abonde, la grâce surabonde » (Rm 5, 20). C’est donc en quelque sorte le jubilé de l’extrême miséricorde qui veut rejoindre tous les hommes, en commençant par les plus grands pécheurs dans la droite ligne des paroles que Jésus a adressé à Sainte Faustine : « Que l’âme faible et pécheresse ne craigne pas de s’approcher de moi, car même si elle compte plus de péchés qu’il n’y a de grains de sable sur terre, tout sombrera dans l’abîme de ma miséricorde. » (PJ1059) « Que les plus grands pécheurs mettent leur espoir en ma miséricorde. Ils ont droit avant tous les autres, à la confiance en l’abîme de ma miséricorde. » (PJ1146)

C’est dans cet esprit que le pape François a souhaité que dans chaque diocèse, il y ait une porte de la Miséricorde, et même plusieurs, de sorte que tous puissent à travers le monde, faire une démarche jubilaire (et non seulement des privilégiés qui auraient les moyens de se rendre à Rome). Les diocèses du monde ouvrent la Porte Sainte quelques jours après celle de la basilique st Pierre, et la fermeront quelques jours avant, en signe d’obédience au pape, pasteur universel et garant de l’unité de l’Eglise.

Ce Jubilé comme tous les jubilés est l’année de la grâce du Christ qui remet les péchés, et non seulement les péchés, mais les peines dues aux péchés, c’est ce que l’on appelle « l’indulgence plénière ». Mais cela suppose que, de notre côté, ce soit l’année de la réconciliation avec les adversaires, l’année de notre conversion, cad de notre retour à Dieu, aux sacrements et de notre décision d’aimer tous les hommes, même ceux que nous considérons comme des adversaires, voir des ennemis. Car le Seigneur l’a dit : il n’y aura pas de miséricorde pour ceux qui ne font pas miséricorde.

Les origines du Jubilé remontent à l’Ancien Testament, à la loi de Moïse qui avait fixé pour le peuple hébreu une année particulière. Dans le Lévitique (28, 8-13), il est prescrit que tous les 7 ans, la terre est laissée en jachère. Et la cinquantième année d’un cycle de 7 X 7 années, intervient une année jubilaire, durant laquelle, non seulement la terre est mise en repos, mais les dettes sont effacées et les esclaves libérés. C’est donc une année de miséricorde, une année sainte. La trompette avec laquelle on annonçait cette année particulière était une corne de bélier, appelée « yôbel » en hébreu d’où le terme « jubilé »

Dans le nouveau Testament, Jésus se présente comme Celui qui amène à son accomplissement ce jubilé, puisque qu’il est venu « annoncer l’année de grâce du Seigneur » (Is 61, 1-2) et apporter la solution à tous nos maux, puisqu’en Lui, le mal est vaincu.

Dans l’Eglise Catholique, c’est sous le Pontificat de Boniface VIII en 1300 qu’est instituée la première Année Sainte avec obligation d’aller en pèlerinage à Rome et de visiter les basiliques St Pierre et st Jean du Latran. Le cycle des jubilés est d’abord fixé à 50 ans (Clément VI). Puis un peu plus tard, en 1470, le pape Paul II le réduit à 25 ans, pour permettre à toutes les générations de connaître dans leur vie au moins une année sainte. Jusqu’aujourd’hui, on compte 26 années saintes ordinaires. La dernière remonte à l’an 2000. Elle a revêtu une importance particulière parce qu’on y a célébré les deux mille ans de la naissance du Christ, et parce qu’elle est la première Année Sainte charnière entre deux millénaires. La tradition de convoquer des jubilés extraordinaires remonte au XVIème siècle. Il est décrété par une inspiration personnelle du pape. Les dernières Années Saintes extraordinaires ont été l’Année Sainte de la Rédemption, convoquée par Pie XI en 1933, après le jubilé ordinaire de 1925, et l’Année Sainte de la Rédemption de 1983, convoquée par Jean-Paul II.

II/ La tradition de la Porte Sainte

La tradition d’une porte sainte à l’occasion d’un jubilé remonte au XVème siècle : C’est le Pape Martin V qui, en 1423 (épopée de Jeanne d’Arc 1429), ouvrit pour la première fois dans l’histoire la Porte sainte de la basilique Saint-Jean de Latran. Ses successeurs maintiennent le rituel et l’étendent aux quatre basiliques majeures, à savoir outre Saint-Jean-de-Latran, les basiliques de Saint-Pierre au Vatican, Sainte-Marie-Majeure et Saint-Paul-hors-les-Murs.

Avant le jubilé de l’an 2000, il était de coutume que le souverain pontife ouvre la Porte sainte de la basilique Saint-Pierre, puis délègue ce pouvoir à un cardinal pour l’ouverture des portes dans les trois autres basiliques. Le pape Jean-Paul II a voulu rompre avec cette tradition, peut –être pour solenniser encore davantage ce jubilé qui nous faisait entrer dans le troisième millénaire. Il choisit de procéder lui-même à l’ouverture et à la fermeture de chacune de ces portes, celle de la basilique Saint-Pierre restant la première à être ouverte et la dernière à être fermée.

Le rituel de la Porte Sainte a connu en 1975 un changement pour mieux mettre en valeur la symbolique de la porte. Jusqu’en 1975, le rite mettait l’accent sur le mur qui empêchait l’accès en temps normal à la Porte sainte. Le rite d’ouverture consistait donc à démolir le mur, ce qui soulignait davantage le côté exceptionnel du jubilé. On utilisait pour ce rite des outils de maçonnerie : un marteau pour faire tomber le mur, une truelle pour bâtir, des briques portant des inscriptions et marques du pontificat, de l’eau bénite pour bénir les pierres et briques, des pièces portant l’effigie du pape pour permettre de dater la construction du mur de la Porte sainte. La porte elle-même n’était pas décorée et consistait seulement en deux battants de bois sans sculptures. A Noël 1975, Paul VI modifie le rite de fermeture de la Porte sainte. Il n’utilise plus la truelle et les briques, pour commencer la reconstruction, mais referme simplement les battants d’une porte de bronze. Le mur est reconstruit à l’intérieur de la basilique, et non plus à l’extérieur de sorte que la symbolique met désormais l’accent sur la porte et non plus sur le mur.

Pourquoi cette symbolique de la porte ?

 La réponse est simple : Cette porte c’est le Christ ! Jésus a dit : « Moi je suis la Porte,  si quelqu’un entre en passant par Moi, il sera sauvé ; il pourra entrer ; il pourra sortir et trouver un pâturage » (Jn 10, 9). Autrement dit, il deviendra vraiment libre. C’est par Jésus-Christ que nous recevons grâce sur grâce, dit saint Jean (1, 16). Qu’est-ce qu’une porte ? C’est le point de passage entre l’extérieur et l’intérieur. Une porte me fait passer du dehors au dedans. Et c’est souvent du dehors que viennent les perturbations, les intempéries, les menaces, les agressions ; la porte me sauve et me protège.

Donc le passage de la Porte Sainte représente symboliquement le passage à une vie nouvelle qui est adhésion au Christ qui me sauve et me protège. Le passage d’une vie marquée par le péché qui me blesse, à une vie marquée par la grâce qui me soigne et me guérit. Le franchissement de la Porte exprime le libre arbitre de chacun ; chacun est libre de se décider, oui ou non, à franchir la Porte, c’est à dire à se convertir ; à laisser derrière soi sa vie ancienne, avec ses mauvaises habitudes, pour entrer dans la vie nouvelle qui est adhésion au Christ par la foi. Ce n’est pas seulement une question de vie morale, d’adhésion à des décrets moraux, à une loi – « la loi nous est venu par Moïse » c’est l’Ancien Testament  – franchir la Porte Sainte, c’est embrasser le Nouveau, cad non plus adhérer à des lois mais adhérer à quelqu’un qui est éternellement vivant, Jésus, Fils de Dieu, qui nous aime, et qui nous dit qu’Il est pour nous le Chemin, la Vérité et la Vie : « la grâce et la vérité nous sont venues par Jésus-Christ (Jn 1, 17) Et Saint Paul de nous dire : « Si quelqu’un est dans le Christ, il est une créature nouvelle. Le monde ancien s’en est allé, un monde nouveau est déjà né » (2 Co 5, 17).

Au début du récit biblique, Adam et Eve sont chassés par leur faute du jardin d’Eden et le Seigneur Dieu « posta, à l’orient du jardin d’Éden, des anges, armés d’un glaive fulgurant, pour en garder l’accès » (Gn 3,24). A la fin du dernier livre biblique, il est dit l’inverse, à savoir que désormais dans la Jérusalem céleste « jour après jour, jamais les portes ne seront fermées, car il n’y aura plus de nuit » (Ap 21, 25). Entre la fermeture des portes du paradis terrestre et l’ouverture permanente des portes de la Jérusalem céleste, se trouve Jésus-Christ qui vient apporter aux hommes le salut. « Il n’y a pas sous le ciel, d’autre nom donné aux hommes, par lequel nous devions être sauvés, que celui de Jésus. (Ac 4, 12)

III/ Pourquoi un jubilé de la miséricorde ?

Je vous disais que par définition un jubilé, une année sainte, est un temps de grâce, de miséricorde, mais que le pape a délibérément choisi d’insister sur le concept de miséricorde. Cela mérite que l’on s’ y attarde un peu.

En effet le monde connaît par le fait de l’apostasie des grands, des puissants de ce monde, et du fait de la mondialisation, un endurcissement, un état de misère spirituelle extrême qui n’est plus seulement individuelle mais sociale, avec, ce que Jean-Paul II appelait des « structures de péchés », qui rendent beaucoup plus difficiles la conversion. Notre civilisation laïciste et moderniste est à l’image d’un sépulcre fermée par une grosse pierre que nous sommes incapables de rouler. Il n’y a que la miséricorde de Dieu qui puisse le faire, et permettre que notre civilisation, qui a progressé malgré tout, avec la grâce de Dieu, puisse sortir de sa culture de mort, et servir à nouveau la vie, la justice et la paix. Le pape François nous dit dans sa bulle d’indiction du jubilé de la miséricorde : « La miséricorde sera toujours plus grande que le péché, et nul ne peut imposer une limite à l’amour de Dieu qui pardonne. » Jésus dit à Sainte Brigitte de Suède : « je ne m’arrête pas à considérer combien l’homme a péché, mais avec quel amour, quelle volonté, quelle intention, il revient. » Et à Ste Faustine, Il dit : « “… Je suis plus généreux envers les pécheurs qu’envers les justes. Pour eux, Je suis venu sur la terre… pour eux, j’ai versé mon sang. Qu’ils ne craignent pas de s’approcher de Moi, ce sont eux qui ont le plus besoin de ma Miséricorde.” (PJ1275) Le pape François écrit encore : « je désire que le jubilé soit une expérience vivante de la proximité du Père, permettant presque de toucher du doigt sa tendresse afin que la foi de chaque croyant se renforce et que le témoignage devienne toujours plus efficace. » (Lettre au président du CPPNE)

Dans cet esprit, nous aurons à cœur, plus que jamais, de soigner la liturgie à Valcluse, pour qu’elle soit à la fois simple et belle, et qu’elle ouvre les cœurs. Nous proposerons, tout au long de l’année, des conférences qui nous exhorteront à comprendre l’abîme de cette Miséricorde divine pour nous convaincre de nous y abandonner. Nous aurons des « soirées Miséricorde » qui seront autant d’espaces propices à ouvrir notre cœur et à demander le pardon de nos péchés dans le Sacrement de Réconciliation. Nous proposerons aussi à tous les pèlerins un « parcours jubilaire » pour leur permettre, en plus des célébrations communautaires, de méditer de manière plus personnelle sur leur vie, avec le secours de la communion des saints, la Vierge en tête, Notre-Dame de Valcuse, Notre-Dame de Lourdes, mais aussi les saints du sanctuaire, Saint Joseph, Saint Michel, Sainte Rita, Sainte Marie-Madeleine, Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus. La célébration eucharistique sera toujours considérée comme le centre et le sommet de toutes les initiatives visant à la dispensation et à l’accueil de cette infinie miséricorde du Père.

Ce Jubilé est comme une nouvelle chance qui nous est donnée de répondre à l’appel de la Miséricorde qui, comme jamais auparavant frappe à la porte de tous les cœurs. Personne n’y est exclu, bien au contraire : « La Miséricorde est la condition de notre salut » nous dit le Pape François. Cette Année Sainte, nous devons la vivre comme un moment extraordinaire de grâce et de renouveau spirituel.

IV/ Marie, Mère de miséricorde

Pourquoi les sanctuaires dédiés à la Vierge Marie sont-ils si propices à la célébration d’un jubilé de la miséricorde ?

C’est en la fête de l’Immaculée-Conception que se sont ouvertes à Rome les portes saintes de l’année jubilaire de la miséricorde. Ceci pour nous rappeler que c’est en Marie que la Miséricorde a été le plus éminemment glorifiée et que sa présence, et sa médiation maternelle, nous ont été données par le Christ lui-même sous forme de testament, pour que cette miséricorde du Seigneur soit aussi glorifiée en nous. C’est au pied de la Croix, que le rôle de Marie est pleinement révélée, alors que s’accomplit l’œuvre de la Miséricorde : « … Jésus, voyant sa mère, et près d’elle le disciple qu’il aimait, dit à sa mère : « Femme, voici ton fils. » Puis il dit au disciple : « Voici ta mère. » Et à partir de cette heure-là, le disciple la prit chez lui. » (Jn 19, 25-27) Celle qui était la Mère du Sauveur nous est donné par Lui, à l’heure de sa mort, comme notre propre mère. Le Christ nous donne Marie comme Mère de Miséricorde. Sans le secours de la Mère de Miséricorde, notre nature blessée risque d’offrir beaucoup de résistance à la miséricorde de Dieu. Depuis l’Incarnation, on peut dire que le Saint-Esprit est beaucoup plus à l’aise pour opérer son œuvre de transformation des membres du Christ, quand il trouve Marie en eux. Le pape François écrit : « Après qu’Adam et Eve eurent péché, Dieu n’a pas voulu que l’humanité demeure seule et en proie au mal. C’est pourquoi Marie a été pensée et voulue sainte et immaculée dans l’amour (cf. Ep 1, 4), pour qu’elle devienne la Mère du Rédempteur de l’homme », Mère du Christ « total » (tête et corps). Et ce par les mérites de l’unique sacrifice du Christ, car la Vierge Marie n’échappe pas à la rédemption accomplie par son Fils, elle est de manière anticipée la première rachetée.

Etant les membres du Corps du Christ, c’est aussi pour nous, pour notre bénéfice que « Marie a été voulue sainte et immaculée dans l’amour ». A Lourdes, Marie a dit solennellement à Bernadette : « Je suis l’Immaculée-Conception » Elle n’a pas seulement dit : « j’ai été conçu sans péché » sous-entendu il y a 2000 ans pour offrir à mon Fils une demeure digne de Lui, une demeure très pure, elle a dit en 1858 : « Je suis l’Immaculée-Conception » Elle utilise l’éternel présent de Dieu qui vient rejoindre le présent de tout homme. « Je suis l’Immaculée-Conception » sous-entendu « je suis cette demeure parfaite de Dieu, cette terre d’accueil où rien ne vient faire obstacle à la croissance de la grâce, pour que le Christ, mon Fils, naisse, grandisse et atteigne sa pleine stature en chacun de ses enfants. C’est pour vous que je suis l’Immaculée-Conception »

Pour qu’une semence sans défaut germe, croisse, et atteigne sa pleine maturité, il faut une terre d’accueil qui soit sans défaut, sans rien qui puisse mettre à mal le développement de la semence. Cette semence sans défaut c’est le Christ, cette terre d’accueil idéale, c’est la Vierge Marie. Et le développement de la semence est l’œuvre du Fertilisant qui est le Saint-Esprit. Ce merveilleux échange entre l’humain et le divin s’est accompli dans le mystère de l’Incarnation, mais il s’accomplit aussi dans le mystère de la rédemption, dans le mystère du salut de nos vies et du salut du monde, un salut pleinement acquis par la mort et la résurrection du Seigneur, mais qui ne s’est pas encore achevé dans son déploiement cosmique. La Vierge Marie y a son rôle unique et irremplaçable, non seulement pour ce qui est de notre salut individuel que pour ce qui est du salut du monde et des structures de péchés qui font obstacle au Règne du Christ sur la terre. « C’est par Marie que le Christ est venu au monde, c’est aussi par elle qu’il doit régner dans le monde » disait prophétiquement St Louis-Marie Grignion de Montfort.

Comme Marie est intervenue à Cana pour que l’eau soit changée en vin, elle intervient sans cesse en Co-Rédemptrice, médiatrice et avocate du genre humain, pour que son Fils sauve le monde qui a perdu le goût du bon vin, c’est à dire de la vie surnaturelle, de la vie de la grâce. Marie a confirmé à Massabielle la vérité proclamée 4 ans plus tôt par le pape Pie IX pour que nous n’hésitions pas à la prendre chez nous, c’est à dire à nous consacrer à son Cœur immaculé pour que par Elle, en Elle et avec Elle, les forces du mal soient réduites à l’impuissance, parce qu’en elle, nous permettons au Saint-Esprit de faire vivre pleinement le Christ en nous.

« Le chapelet, écrit le président du Conseil Pontifical PNE, est la façon la plus simple et la plus directe, transmise par la tradition de la piété populaire, pour invoquer la miséricorde de Dieu à travers l’intercession de la Vierge Marie. A Valcluse, chaque jour la messe est suivie de la méditation du chapelet.

V/ L’ indulgence jubilaire

Extrait de la lettre que le pape François a écrite à Mgr Rino Fisichella

« (…) Je désire que l’indulgence jubilaire soit pour chacun une expérience authentique de la miséricorde de Dieu, qui va à la rencontre de tous avec le visage du Père qui accueille et pardonne, oubliant entièrement le péché commis. Pour vivre et obtenir l’indulgence, les fidèles sont appelés à accomplir un bref pèlerinage vers la Porte sainte, ouverte dans chaque cathédrale ou dans les églises établies par l’évêque diocésain, ainsi que dans les quatre basiliques papales à Rome, comme signe du désir profond de véritable conversion. De même, j’établis que l’on puisse obtenir l’indulgence dans les sanctuaires où est ouverte la Porte de la Miséricorde et dans les églises qui sont traditionnellement identifiées comme jubilaires. Il est important que ce moment soit uni, avant tout, au Sacrement de la Réconciliation et à la célébration de la sainte Eucharistie par une réflexion sur la miséricorde. Il sera nécessaire d’accompagner ces célébrations par la profession de foi et par la prière pour ma personne et pour les intentions que je porte dans mon cœur pour le bien de l’Eglise et du monde entier.

Je pense, en outre, à ceux qui, pour divers motifs, n’auront pas la possibilité de se rendre à la Porte sainte, en premier lieu les malades et les personnes âgées et seules, que leurs conditions empêchent souvent de sortir de chez eux. Pour ces personnes, il sera d’une grande aide de vivre la maladie et la souffrance comme expérience de proximité au Seigneur qui, dans le mystère de sa passion, mort et résurrection, indique la voie maîtresse pour donner un sens à la douleur et à la solitude. Vivre avec foi et espérance joyeuse ce moment d’épreuve, en recevant la communion ou en participant à la Messe et à la prière communautaire, également à travers les divers moyens de communication, sera pour elles la façon d’obtenir l’indulgence jubilaire. Ma pensée va aussi aux détenus, qui font l’expérience de la restriction de leur liberté. Le Jubilé a toujours constitué l’opportunité d’une grande amnistie, destinée à toucher de nombreuses personnes qui, bien que méritant une peine, ont toutefois pris conscience de l’injustice qu’elles ont commise, et désirent sincèrement s’insérer à nouveau dans la société en apportant leur contribution honnête. Qu’à toutes ces personnes parvienne de façon concrète la miséricorde du Père qui désire être proche de ceux qui ont le plus besoin de son pardon. Dans les chapelles des prisons, elles pourront obtenir l’indulgence et, chaque fois qu’elles passeront par la porte de leur cellule, en adressant leur pensée et leur prière au Père, puisse ce geste signifier pour elles le passage de la Porte sainte, car la miséricorde de Dieu, capable de transformer les cœurs, est également en mesure de transformer les barreaux en expérience de liberté.

J’ai demandé que l’Église redécouvre en ce temps jubilaire la richesse contenue dans les œuvres de miséricorde corporelle et spirituelle. L’expérience de la miséricorde, en effet, devient visible dans le témoignage de signes concrets comme Jésus lui-même nous l’a enseigné. Chaque fois qu’un fidèle vivra l’une ou plusieurs de ces œuvres en première personne, il obtiendra certainement l’indulgence jubilaire. D’où l’engagement à vivre de la miséricorde pour obtenir la grâce du pardon complet et total en vertu de la force de l’amour du Père qui n’exclut personne. Il s’agira donc d’une indulgence jubilaire plénière, fruit de l’événement lui-même qui est célébré et vécu avec foi, espérance et charité.

Enfin, l’indulgence jubilaire peut être obtenue également pour les défunts. Nous sommes liés à eux par le témoignage de foi et de charité qu’ils nous ont laissé. De même que nous les rappelons dans la célébration eucharistique, ainsi, nous pouvons, dans le grand mystère de la communion des Saints, prier pour eux afin que le visage miséricordieux du Père les libère de tout résidu de faute et puisse les accueillir dans ses bras, dans la béatitude qui n’a pas de fin.

L’un des graves problèmes de notre temps est sans aucun doute le changement du rapport à la vie. Une mentalité très répandue a désormais fait perdre la sensibilité personnelle et sociale adéquate à l’égard de l’accueil d’une vie nouvelle. Le drame de l’avortement est vécu par certains avec une conscience superficielle, qui semble ne pas se rendre compte du mal très grave qu’un tel acte comporte. Beaucoup d’autres, en revanche, bien que vivant ce moment comme un échec, considèrent ne pas avoir d’autres voies à parcourir. Je pense, en particulier, à toutes les femmes qui ont eu recours à l’avortement. Je connais bien les conditionnements qui les ont conduites à cette décision. Je sais qu’il s’agit d’un drame existentiel et moral. J’ai rencontré de nombreuses femmes qui portaient dans leur cœur la cicatrice de ce choix difficile et douloureux. Ce qui a eu lieu est profondément injuste ; pourtant, seule sa compréhension dans sa vérité peut permettre de ne pas perdre l’espérance. Le pardon de Dieu à quiconque s’est repenti ne peut être nié, en particulier lorsqu’avec un cœur sincère, cette personne s’approche du Sacrement de la Confession pour obtenir la réconciliation avec le Père. C’est également pour cette raison que j’ai décidé, nonobstant toute chose contraire, d’accorder à tous les prêtres, pour l’Année jubilaire, la faculté d’absoudre du péché d’avortement tous ceux qui l’ont provoqué et qui, le cœur repenti, en demandent pardon. Que les prêtres se préparent à cette tâche importante en sachant unir des paroles d’authentique accueil à une réflexion qui aide à comprendre le péché commis, et indiquer un itinéraire de conversion authentique pour pouvoir obtenir le pardon véritable et généreux du Père qui renouvelle tout par sa présence.

Une dernière considération s’adresse aux fidèles qui, pour diverses raisons, désirent fréquenter les églises où les offices sont célébrés par les prêtres de la Fraternité Saint-Pie X. Cette Année jubilaire de la Miséricorde n’exclut personne. Certains confrères évêques m’ont fait part en plusieurs occasions de leur bonne foi et pratique sacramentelle, unie toutefois à la difficulté de vivre une situation pastorale difficile. J’espère que dans un proche avenir, l’on pourra trouver les solutions pour retrouver une pleine communion avec les prêtres et les supérieurs de la Fraternité. Entre-temps, animé par l’exigence de répondre au bien de ces frères, j’établis, par ma propre disposition, que ceux qui, au cours de l’Année sainte de la Miséricorde, s’approcheront, pour célébrer le Sacrement de la Réconciliation, des prêtres de la Fraternité Saint-Pie X recevront une absolution valide et licite de leurs péchés.

M’en remettant à l’intercession de la Mère de la Miséricorde, je confie à sa protection la préparation de ce Jubilé extraordinaire. » Vatican 1er sept 2015

En résumé, pour bénéficier de l’indulgence plénière du jubilé, ma démarche doit répondre à 5 conditions :

1/ désirer sincèrement me convertir en suivant le Christ qui est la Porte du Royaume

2/ désirer sincèrement me détacher du péché, même véniel

3/ fréquenter le sacrement de réconciliation

4/ fréquenter le sacrement de l’Eucharistie

5/ prier pour le pape et à ses intentions

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